Enchantée !

A 8 ANS, j'écris un texte qui interroge l'âme et cherche à comprendre qui nous sommes. Je fabrique des mini-romans avec des feuilles A4 pliées en 4 et je rêve de devenir "maîtresse de CP pour apprendre aux enfants à lire" (et donc à pouvoir apprendre par eux-mêmes en déployant leurs horizons à l'infini). Ma vocation est déjà bien présente : simplement, aujourd'hui, j'apprends également aux gens à lire... en eux-mêmes ! C'est aussi l'époque où je suis diagnostiquée "précoce et surdouée" mais ma maturité émotionnelle, elle, est loin d'être en avance sur celle de mes pairs ! De la primaire au collège, amitié et sociabilisation sont pour moi sources de bien des blessures : rejet, incompréhension, injustice, la relation à l'autre me paraît d'une complexité inouïe.

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A 15 ANS, je ne comprends absolument pas comment il est possible que mes amies (enfin ! Des amitiés qui tiennent !) me trouvent mature, sage, sachante, avisée, à l’écoute et de bon conseil tandis que ma famille me juge insupportable, cyclothymique, susceptible et manichéenne. Comment peut-on être perçue si différemment ? Évidemment, je ne sais encore rien des multiples parts de soi ou des miroirs que nous sommes les uns pour les autres…

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A 22 ANS, après la validation d'un beau master de recherches en Littérature Française, qui commence à "resserrer le filet", je prends la fuite et largue toutes mes amarres : je m'envole pour l'Inde et le Népal en mode "backpack". J'y vis une expérience de bénévolat pour des nonnes bouddhistes qui va changer la trajectoire de ma vie.

A mon retour, je valide un master pro pour devenir enseignante de français langue étrangère. Puis je décide d'enseigner en menant une vie de voyage et je me spécialise en ingénierie pédagogique : je ne le sais pas encore mais ce que je recherche, c’est la rencontre de l’humain, de sa psychologie et du fil d'or qui nous relie tous. Angleterre, Inde, Népal, Indonésie, Irlande, Espagne : je m’imprègne des langues, des paradigmes éducatifs, des philosophies et du contact. Je comprends confusément que la rencontre de l’autre permet ma propre rencontre mais je ne pose encore aucun mot dessus, aucune idée.

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A 27 ANS, je réintègre la France pour épouser mon grand amour, et ce retour à ma terre natale occasionne un retour sur mes terres intérieures. « Je fais retour », comme le dit Padovani. Un immense travail de déblayage commence : je réalise que je ne vis pas mes émotions mais que je les pense (ce qui est nettement plus sécure, n’est-ce pas ?), je prends conscience de mon enfermement dans la dualité, je me forme en Communication Non-Violente, renoue avec mon enfant intérieur, étudie les multiples parts de soi qui nous composent et le transgénérationnel qui rejoue à notre insu les mêmes histoires, génération après génération. Puis je fonde mon auto-entreprise pour me mettre au service de l'intelligence émotionnelle.

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EN 5 ANS, je publie deux livres auprès d’un éditeur spécialisé en vulgarisation des sciences humaines (Enrick B. Editions) et l'un d'eux est réédité chez Marabout (!), je suis référencée à l'échelle départementale (Réseau Parents en Aveyron), je reçois des commandes publiques pour des organismes sociaux de ma région et la CAF elle-même me missionne et me fait confiance. Je prends du grade. Je sais que je suis à ma place et que c'est bien ainsi que je dois œuvrer. Mais surtout, je continue d’apprendre.

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Je travaille dur sur le syndrome de l’imposteur car ce que j'enseigne n'est pas encore "diplômable" (sauf par certains instituts privés hors de prix et éligibles au CPF d'ici... 50 ans ? si tout avance bien !). Ma formation est empirique, autodidacte, intuitive, compilée, pleinement vécue et donc pleinement vibrée. C’est ce qui fait que ça marche. Je fais du bien aux gens et on me le dit : je les amène à la rencontre d’eux-mêmes, de leurs constructions mentales et schémas inconscients. Mon travail intéresse, dénoue, éclaire, soutient, allège, libère, fait pleurer, et revenir.

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Mais surtout, surtout, durant ces 5 précieuses années de croissance intérieure, je deviens Maman : Tremblement de terre. Miracle. « Grâce et trébuchement », du nom de mon premier roman non publié. Je fais retour, de nouveau, dans la forge alchimique de mon être. Plus loin encore, plus fort, plus profond. Je prends conscience de tellement plus de chaînes, des chaînes que je refuse de transmettre à ma fille et auxquelles je dois m’atteler, maintenant et consciemment.

Car non contente d’avoir été recontactée, mon enfant intérieure se veut désormais reconnue, libérée de toute injonction et de toute injustice passée. J’apprends à lui laisser plus de place encore et je l'aide à régler ses comptes, pour que cessent avec moi les croyances du « je ne suis pas assez », « tout se mérite », « il faut faire plus », « sois sage », « faire plaisir », « ne pas blesser, ne pas dire », et « on (= JE) ne me reconnait pas ». Car je veux que ma fille soit Libre. Profondément, intrinsèquement, libre d’être libre.

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Après avoir laissé de la place à mon enfant intérieur, j’apprends aussi à la remettre à sa place pour devenir véritablement adulte, c’est à dire sans plus se laisser dicter par nos schémas victimaires. Car c’est en devenant pour moi-même la meilleure des mères intérieures que je pourrai devenir pour ma fille la mère dont elle a besoin : poser mes limites, apprendre à devenir pleinement responsable de mes émotions comme de mes besoins et de mes désirs, me rendre souveraine et légitime, et, le plus grand des défis, m’aimer. Ou peut-être simplement (et n’est-ce finalement pas le même chose ?) me laisser véritablement être aimée.

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La maternité, couplée à l’entreprenariat, me fait friser le burn-out. Elle m’enseigne également un retour au corps qui me devient vital tant j’ai épuisé le mien, en pompant chaque kilo et chaque repos pour ma fille, chaque neurone et chaque calorie pour ma clientèle. J’apprends, à plus de 30 ans, que mon corps ne sert pas uniquement à déplacer ma tête d’une pièce à l’autre ! Je me forme en Théorie Polyvagale, comprends mon système nerveux et les cercles vicieux dans lesquels il m’entraîne en croyant me protéger. Je travaille mon enracinement, mon souffle, mon énergie, mon chant. Redescendre de cette tête surpuissante qui me téléguide chaque seconde à ce corps fatigué qui me lâche est certainement l’apprentissage le plus difficile que j’ai à faire. Mais ce n'est qu'ainsi que je vais pouvoir transformer l'essai.

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Depuis cette année, je continue de proposer des cercles de chant d'impro mensuels sur Figeac (circle songs, bains sonores...) et de répondre aux commandes en psychologie des émotions, mais voilà aussi que j'enseigne de nouveau le français, non plus à l'étranger avec des adultes en écoles privées mais en France avec des adolescents au collège. Nouer contact avec ce public ado-rable (fonctionne aussi avec ado-râ(b)le !) est profondément nourrissant car riche en émotions, bien sûr, mais aussi en réajustements intérieurs. Je redeviens funambule, en équilibre sur un nouveau fil de mon merveilleux tissage. Quoi de meilleur qu'un.e enseignant.e éternellement apprenant.e ?

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